Qu’est-ce qu’un risque d’origine glaciaire et périglaciaire ?

Mis à jour le 06/03/2023
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Moins connu que les autres risques naturels, les risques d’origine glaciaire et périglaciaire pourraient s’accentuer ces prochaines années avec le réchauffement climatique et la réduction du volume et de la surface des glaciers des Alpes occidentales.

Cette diminution commencée il y a un siècle et augmentée à partir des années 80 entraîne une instabilité des zones glaciaires et périglaciaires.

Le glacier de la Mer de Glace a par exemple reculé de plus de 2 km depuis 1850 et perd ces dernières années entre 5 et 10 mètres d’épaisseur par an.

La fonte des glaces peut provoquer l’accumulation d’une plus ou moins grande quantité d’eau avec le risque de vidange brutale mais aussi des chutes de glace et/ou de matériaux provenant du glacier ou des zones périglaciaires avec des répercussions parfois dramatiques dans la vallée.

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Conséquences du réchauffement climatique en régions de montagne

On distingue trois grands types de phénomènes d’origine glaciaire et périglaciaire générateurs de risques :

  • les phénomènes résultant de l’écoulement plus ou moins brutal d’eau sous forme liquide momentanément stockée au niveau de l’appareil glaciaire ou périglaciaire ;
  • les phénomènes résultant du mouvement gravitaire de masses d’eau sous forme solide (glace) qui se détachent du glacier ;
  • les phénomènes périglaciaires qui sont consécutifs à la fonte du pergélisol (ou permafrost).

Les vidanges de lacs glaciaires ou de poches d’eau sont susceptibles de produire, en fonction des volumes mis en jeu et de la brutalité de la vidange, des crues se propageant dans le réseau hydrographique à l’aval du glacier.

Ces crues peuvent avoir un caractère torrentiel marqué, avec des transports de sédiments à des concentrations importantes (par charriage voire laves torrentielles - voir définition au chapitre inondation), dès lors que les stocks de sédiments mobilisables sont importants et que les écoulements ont l’énergie suffisante pour les mettre en mouvement et les transporter.

Comment se manifeste-t-il ?

Les différentes manifestations des risques glaciaires et périglaciaires sont :

Les vidanges brutales de lacs glaciaires et périglaciaires

L’avancée et le recul des glaciers créent des barrages de glace ou des moraines qui peuvent retenir l’eau et créer un lac glaciaire. Ces barrages naturels formés de glace et/ou de moraine sont fragiles et peuvent céder brutalement :

  • par submersion du barrage : glissement de berges, avalanche, chute de blocs rocheux ou de glace, rupture d’une poche d’eau en amont créant dans la retenue une vague supérieure à la hauteur du barrage ;
  • par infiltration d’eau à travers le barrage morainique et érosion (phénomène de renard) pouvant conduire à l’effondrement du barrage ;
  • par désorganisation d’un barrage de glace avec fracturations successives, création d’un chenal de plus en plus conséquent jusqu’à la rupture brutale.

Des lacs peuvent également se constituer par la dégradation d’un pergélisol (sous-sol gelé en permanence pendant au moins 2 ans) riche en glace avec remplissage de la dépression (lacs thermokarstiques comme par exemple au glacier de Chauvet dans les Alpes-de-Haute-Provence).

Ce type de risque lié à une vidange de lacs glaciaires est fréquemment rencontré dans les Alpes.

Les vidanges de poches d’eau intraglaciaires

La rupture d’une poche d’eau située à l’intérieur du glacier (soit intraglaciaire lorsqu’elle est dans l’épaisseur du glacier, soit sous glaciaire lorsqu’elle est entre le glacier et le lit) constitue probablement le danger le plus important. En effet ces poches d’eau sont indécelables de l’extérieur, leur processus de formation est encore mal connu et leur rupture est souvent meurtrière du fait de leur soudaineté, de leur imprévisibilité et de l’importance des laves torrentielles qu’elles sont en mesure d’engendrer.

Dans tous les cas, le risque réside dans le lâcher brutal de cette masse d’eau. S’il existe un exutoire naturel latéral, l’eau s’évacue dès que le niveau du canal est atteint. La vidange se fait alors naturellement et ne peut aboutir à un phénomène de grande ampleur.

Mais, en l’absence d’exutoire, la pression hydrostatique peut devenir très importante et l’eau peut profiter de l’hétérogénéité mécanique de la glace, due aux contraintes locales qu’elle subit, pour rompre une zone de faiblesse. Un bouchon de glace est alors violemment expulsé et se produit alors la vidange brutale de la poche d’eau.

Les chutes de séracs

Ces blocs de glace se détachent à l’aval d’un glacier suspendu lorsque le seuil de plasticité de la glace est atteint. Dans leur chute, ces blocs se fracturent en morceaux de plus en plus petits emportant tout sur leur passage et pouvant provoquer des avalanches de neige très importantes ou des laves torrentielles dévastatrices (séracs de Taconnaz dans la vallée de Chamonix).

Le mouvement gravitaire de matériaux plus ou moins mêlés de glace provenant des zones périglaciaires :

  • déstabilisation de glaciers rocheux avec chutes de pierres au front, accélération de mouvement, rupture ;
  • dégradation de parois rocheuses ;
  • instabilité de secteurs désenglacés, entraînant des mouvements de terrain divers allant d’une simple chute de pierres jusqu’à une rupture totale, glissement, plus ou moins mêlés d’eau (lave torrentielle).

Ces différentes manifestations peuvent se combiner créant ainsi un effet domino ou effet en cascade, la vidange d’une poche d’eau en amont créant une surverse d’un lac glaciaire pouvant générer des mouvements gravitaires avec chutes de sérac, avalanches et lave torrentielle dans la vallée.

Les conséquences sur les personnes et les biens

En fonction des différentes manifestations et conditions de survenue, le risque d’origine glaciaire et périglaciaire peut avoir des conséquences dramatiques tant pour l’homme que pour ses activités et son environnement.

Ainsi en 1892, la vidange de la poche d’eau sous glaciaire du glacier de Tête Rousse dans la vallée de Saint-Gervais-les-Bains (massif du Mont-Blanc) a entraîné la libération d’un volume d’eau et de glace d’environ 200 000 m3. Cette vidange a mobilisé une grande quantité de matériaux sur son parcours et a provoqué une lave torrentielle dévastatrice estimée à 1 000 000 m3. La commune de Saint-Gervais-les-Bains fut fortement touchée et 175 victimes furent dénombrées.

Depuis, l’attrait de la montagne et des sports d’hiver et l’urbanisation croissante des stations de montagne ont augmenté la vulnérabilité des enjeux. Le réchauffement climatique augmente quant à lui la probabilité de l’aléa.

Cela montre l’importance des réflexions en cours sur ce risque émergent qui peut avoir des lourdes conséquences :

  • conséquences humaines : au nombre des victimes corporelles (allant de la blessure légère au décès) parfois important, s’ajoute le nombre de sans abri, potentiellement important compte tenu des dégâts aux constructions.
  • conséquences économiques : les destructions ou dommages portés aux édifices privés ou publics, au patrimoine, aux ouvrages (ponts, routes…), aux réseaux divers, aux infrastructures industrielles, peuvent entraîner des coûts importants.
  • conséquences environnementales : les éboulis, chutes de blocs, coulées boueuses, avalanches, peuvent entraîner un remodelage des paysages, un endommagement de zones forestières, une atteinte en profondeur des sols (avalanche lourde). Une obturation d’une vallée par les matériaux déplacés peut engendrer la création d’une retenue d’eau pouvant rompre brutalement et entraîner une vague déferlante dans la vallée.