Les mouvements de terrain dans le département

Mis à jour le 06/03/2023

Il en découle une grande diversité des contextes géologiques, lithologiques et topographiques.

Deux ensembles majeurs peuvent alors être distingués :

  • à l’Est, le domaine alpin, avec les massifs cristallins externes du Mont-Blanc et des Aiguilles Rouges, les chaînes subalpines (Bauges, Bornes, Aravis et Haut-Giffre), les Préalpes du Chablais…) ;
  • à l’Ouest, le piémont, correspondant aux bassins molassiques du Genevois et du Bas Chablais, au Plateau des Bornes, de l’Albanais ou du bassin de Rumilly, dans lequel s’insère l’extrémité méridionale du Massif Jurassien (Vuache, Salève...).

On peut ainsi décliner du Sud-Est vers le Nord-Ouest la succession de grands ensembles géologiques couvrant un large panel de roches :

  1. les massifs cristallins du Mont-Blanc et des Aiguilles Rouges sont constitués de roches métamorphiques et magmatiques dont la caractéristique, de part la vigueur de l’orogenèse, est d’être traversés par de nombreuses failles ;
  2. les Chaînes subalpines des Bauges, des Bornes, de l’Aravis et du Haut-Giffre sont formées uniquement de roches sédimentaires. Il s’agit d’une alternance de roches calcaires rigides et de roches argileuses plastiques. De spectaculaires dysharmonies sont particulièrement bien visibles au "pli d’Arpenaz" (rive droite de l’Arve au Nord de Sallanches). Ces calcaires connaissent des phénomènes karstiques (lapiaz et grottes nombreuses).

Les Préalpes du Chablais sont caractérisées par des empilements de roches extrêmement variées, le secteur se trouvant au point d’inflexion de l’Arc Alpin évoqué plus haut.

Le Jura Savoisien est caractéristique de ce massif calcaire dont il est un prolongement strict. On y trouve des roches très dures et donc saillantes comme les dolomies.

Les bassins molassiques sont également un prolongement d’un ensemble qui s’étend jusqu’en Isère.

Dans cette formation constituant la partie la plus occidentale du territoire départemental, le grès prédomine mais on y trouve également des calcaires, des marnes et du gypse. Le relief y est « doux » et si les formations de surfaces sont homogènes, les épaisseurs sont en revanche très variables.

Les terrains quaternaires sont représentés par les dépôts d’alluvions dans les vallées dus à la forte érosion, essentiellement glaciaire, du massif montagneux.

Le rythme de l’orogenèse, alternant phases de croissances plus ou moins rapides du relief, explique cette grande richesse géologique.

Aujourd’hui, les processus géologiques (compression, soulèvement, érosion) se poursuivent vigoureusement. Les taux d'exhumation sont compris entre 1,5 et 2 km/Ma, ce qui correspond à la mise en place des Alpes internes. Ces taux d'exhumation sont importants mais inférieurs à ce que l'on peut trouver dans l'Himalaya par exemple. Ils sont toutefois comparables aux niveaux observés dans la plupart des montagnes jeunes.

Ainsi, cette dynamique géologique complexe, combinée à un relief vigoureux, concourt à faire de la Haute–Savoie un territoire particulièrement exposé aux différents phénomènes de mouvement de terrain.

©

Carte géologique simplifiée du département

Les différents types de mouvements de terrain dans le département

En Haute-Savoie, il s’agit principalement de glissements de terrain ainsi que d’éboulements et chutes de blocs.

Les glissements de terrain

Le glissement est un déplacement généralement lent (quelques millimètres par an mais peu aller jusqu’à quelques mètres par jour) sur une pente, le long d’une surface de rupture (surface de cisaillement) identifiable, d’une masse de terrain cohérente, de volume et d’épaisseur variables.

Cette surface est généralement courbe (glissement circulaire ou rotationnel) mais elle peut aussi se développer à la faveur d’une discontinuité préexistante telle qu’un joint de stratification (glissement plan).

Les profondeurs des surfaces de glissement sont très variables, de quelques mètres à plusieurs dizaines de mètres, voire la centaine de mètres pour certains glissements de versant entier. Des indices caractéristiques peuvent être observés dans les glissements de terrain actifs, niches d’arrachement, fissures, bourrelets, arbres basculés "en tuyau de pipe", zones de rétention d’eau…

©

Carte départementale de l’historique des mouvements de terrain (événements de 1900 à 2019)

Les éboulements et les chutes de blocs

Mouvements rapides, discontinus, et brutaux, les chutes de blocs et de pierres résultent de l’action de la pesanteur et affectent le plus souvent des matériaux rigides tels que les calcaires, les grès et les roches cristallines. Les trajectoires de chutes observées lors de ce type de phénomène, suivent généralement la ligne de plus grande pente mais peuvent être modifiées selon la forme de la masse rocheuse en chute et les irrégularités du versant. Il existe plusieurs facteurs naturels déclencheurs : les pressions hydrostatiques, l’alternance gel/dégel, la croissance de la végétation, les secousses sismiques, l’affouillement ou le sapement de la falaise. Même de faibles volumes de masse rocheuse en chute peuvent constituer un danger important pour les personnes.

Les affaissements et les effondrements

Les affaissements de cavités souterraines naturelles ou artificielles (carrières et ouvrages souterrains) résultent d’une déformation souple sans rupture, relativement peu marquée et progressive des couches de sol situées au-dessus d’une cavité naturelle (dissolution de matériaux solubles comme le calcaire, le gypse, le sel...) ou anthropique (carrière, cave, aqueduc, crypte, tunnel...). Ils se traduisent par une dépression topographique de la surface en forme de cuvette à fond plat sans qu’apparaissent de fractures sur les bords.

Selon leur évolution au fil du temps, ces cavités peuvent voir leur toit s’effondrer. Par ailleurs, des portions de sol peuvent s’effondrer soudainement suite à un ou plusieurs effondrements souterrains préalables sous forme de fontis.

La base de données "cavités" du BRGM recense 708 cavités d’origine naturelle et 129 cavités d’origine anthropique (2 caves, 86 ouvrages civils ou militaires, 41 carrières).

Le retrait-gonflement des argiles

Le matériau argileux présente la particularité de voir sa consistance se modifier en fonction de sa teneur en eau. Dur et cassant lorsqu’il est asséché, un certain degré d’humidité le fait se transformer en un matériau plastique et malléable. Ces modifications de consistance peuvent s’accompagner, en fonction de la structure particulière de certains minéraux constitutifs, de variations de volume plus ou moins conséquentes : forte augmentation de volume (phénomène de gonflement) lorsque la teneur en eau augmente, et inversement, rétractation (phénomène de retrait) en période de déficit pluviométrique marqué.

Les phénomènes de capillarité, et surtout de succion, sont à l’origine de ce comportement. Les variations de volume des sols argileux répondent donc à des variations de teneur en eau (on notera que des variations de contraintes extérieures - telles que les surcharges - peuvent, par ailleurs, également générer des variations de volume).

Toutes les familles de minéraux argileux ne présentent pas la même prédisposition au phénomène de retrait-gonflement. L’analyse de leur structure minéralogique permet d’identifier les plus sensibles. Le groupe des smectites et, dans une moindre mesure, le groupe des interstratifiées (alternance plus ou moins régulière de feuillets de nature différente) font partie des sols les plus sujets au phénomène.

©

Carte départementale de l’exposition au retrait-gonflement des argiles

Les mouvements de terrain marquants dans le département

L'histoire de la Haute-Savoie est marquée par la catastrophe du plateau d'Assy (commune de Passy) en 1970 : une coulée boueuse chargée de débris rocheux et contenant d’importantes quantités de neige s'est répandue sur un sanatorium causant la mort de 71 personnes.

Quelques autres évènements récents dans le département :

©

Glissement à Samoëns en 2016

©

Chute de bloc à Morzine en 2013

  • Janvier 2022, Saint-Gervais-les-Bains, glissement de terrain provoquant l’isolement du hameau de Bionnassay ;
  • Juin 2021, Bossey : évacuation de 52 logements suite à un glissement de terrain ;
  • Mars 2020 : glissement de Saint-Ferréol qui a entraîné une rupture de la liaison routière ;
  • Février 2020 aux Rochers de Vange (Sallanches), effondrement d’un pan de falaise de plus de 80 000 m³ ;
  • Juin 2016 : glissement de Saint-Sigismond dont les causes pourraient remonter à un séisme survenu en 2014 ;
  • Avril 2016, Samoëns : évacuation d’un chalet suite à un glissement de terrain ;
  • Novembre 2013 aux Côtes (les Villards-sur-Thônes), un glissement de surface emporte un chalet suite à une forte pluviométrie ;
  • Avril 2013 aux Allamands (Morzine) : chute de bloc de 60 tonnes s'arrêtant entre 2 bâtiments ;
  • Décembre 2012, Chevranges (Pers-Jussy) : glissement entraînant l’évacuation puis la destruction d’une habitation ;
  • Janvier 2009, Veyrier du Lac : plusieurs blocs de 1,3 et 3,5 m³ frôlent les habitations.

Les enjeux dans le département

Le département de la Haute-Savoie est principalement concerné par les risques chutes de blocs et de glissements de terrain.

Le phénomène de retrait et de gonflement des argiles, bien que présent acquière une importance secondaire.

En parallèle, la population est importante et concentrée dans les vallées et les points bas en général, la sensibilité aux risques majeurs mouvement de terrain est particulièrement élevée.

Ce risque est d’autant plus un enjeu qu’il peut se manifester sous toutes les formes qu’on lui connaît, à travers des évènements qui peuvent être spectaculaires et violents, ponctuels et étendus, lents ou rapide ce qui impacte et complique l’organisation des secours.

Par conséquent, le risque majeur mouvement de terrain est sans doute l’un de ceux qui contribue le plus à la culture du risque dans ce département par ses manifestations spectaculaires et constitue sans doute également un élément singulier de sa culture locale et de son identité.

Entre 1995 et 2018, sur 33 communes du département, les biens assurés indemnisés (autres que véhicules terrestres à moteur) représentent pour le marché de l’assurance un cumul estimé à plus de 20 millions d’euros.